Les den norske gjendiktningen ved Lars Haga Raavand her.
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Il vaut mieux qu’il pleuve aujourd’hui plutôt qu’un jour il où il fait beau
Les mouches piquent davantage avant un orage – au moins 5000 par jour et Dans le climat fait l’homme, le Dr Mills affirme que les sons, les couleurs, les mouvements, le temps et surtout les vents persistants ont une influence sur le comportement humain, la musique adoucit, le vert calme, les voyages inquiètent, le foehn déprime et le levantin oppresse. «C’est précisément pendant un coup de vent d’est, répéta le docteur à Voltaire, que Charles Ier fut décapité et que Jacques II fut déposé». L’air dans sa course apparaît d’une manière, souvent d’une autre
c’est lui qui produit le tonnerre, les éclairs, la foudre et les ouragans ; quand il est enfermé dans un nuage épais et qu’en raison de sa subtilité et de sa légèreté il en est expulsé, alors le déchirement cause le bruit et la dilatation illumine la nuit. En fuite devant un orage violent, un habitant de Trownbridge se retourne pour voir ce qui produit des bruits mous sous ses talons : il pleut des grenouilles vertes, muettes et glissantes tandis qu’à Providence le sol se couvre de poissons vivants. La foudre gouverne tout, la foudre gouverne l’univers, la foudre est un pilote qui règle toutes choses à sa guise et l’air en courant va partout
et la brume une distraction, un obstacle mou, avec les démons indifférents aux écarts et traîtres à l’esprit qui défait le paysage, les objets et les faits, un smog gris et sans résonance comme le brouillard l’est, si taché parfois que les ultraviolets ne le traversent pas. Pourtant, dit le stratège de guerre, les vapeurs du matin et les nuages épais ont des vertus, ils empêchent les liaisons, rendent l’ennemi invisible et la pluie paralyse le mouvement des bataillons. Mais si l’espace intermédiaire était vide, on verrait s’il y a une mouche dans le ciel, l’air d’une manière souvent autrement et plein du battement de ce qui s’en va
pourquoi cette fumée est-elle jaune ? demande Monica Vitti dans le désert rouge, elle est empoisonnée. Donc si un oiseau passe il meurt ? Oui mais ils le savent et ils ne passent plus et se cachent – la nature aime se cacher, ou ils partent à contre temps pour trouver de quoi manger. Des insectes fluo, un beau champignon atomic, jaune et noir de fumée vomi par la cheminée, elle monte verticalement, les girouettes sont inefficaces ; le vent est sensible contre la peau du visage, les feuilles bruissent, une girouette est mise en mouvement – petite brise ; les feuilles et les ramures s’agitent, les petits pavillons se déplacent ; la poussière et les papiers volent, les petites branchent remuent – jolie brise, un frisson dans l’air où voyagent les images
les petits arbres feuillus balancent, des vaguelettes se forment sur l’eau – vent frais ; les grosses branches se balancent, les fils télégraphiques piaulent, l’usage du parapluie est délicat ; les grands arbres ploient, marcher à contre vent devient difficile ; le vent arrache les ramures, déporte les voitures – coup de vent ; légers dégâts aux toitures, le vent fait voler les cheminées ; les arbres sont déracinés, les constructions subissent de gros dommages – forte tempête. Il frappe les objets et les retourne comme les nuages qui abusent volontiers nos yeux, en montrent trop ou pas assez, un ours blanc, une sacrée baleine ou un rocher spongieux, mais ne présagent plus rien de bon ni de mauvais, si opaques qu’on ne peut dire s’il fait jour ou nuit dans l’air refroidi
un beau jour Héraclite se retire excédé, il ne mange plus que des plantes et des herbes, elles aussi éprouvent des appétits, tristesse et joie et l’homme lui-même est sorti de la terre tels les épinards. Mais elles le rendent hydropique, aux médecins il demande alors comment transformer des pluies en sécheresse. Et partout et de partout le déluge, ça coule, ça coule, et dans le bas une feuille est emportée, un morceau d’écorce disparaît. L’énigme est trop grande : question, devinette, avertissement ? Enveloppé de bouse il se couche au soleil de la taille d’un pied d’homme et meurt le lendemain. Le pansement est aussi un poison et l’air rempli de particules, élastique et élémentaire, souvent courait ailleurs
à la manière de la poussière plus instable que les ondes, qui absorbent et diffusent, éparpillée entre les étoiles, vieilles étoiles dégradées et galaxies en poudre avant de traverser l’atmosphère pour venir se poser et dessiner un drôle de paysage, un paysage mal dessiné vu par un oiseau, une mouette par exemple ou bien un papillon dont le battement de l’aile peut provoquer des effets astronomiques car la nature est une machine dans ses moindres parties, une machine infinie qui fait et défait dans le désordre les songes, l’air et la matière
le plus bel ordre, l’ordre du monde est semblable à un tas d’ordures répandues pêle-mêle, le bel ensemble cosmique, le plus beau des tas rassemblé au hasard, selon les lieux plusieurs lunes et plusieurs soleils aussi, nouveau ce dernier chaque jour et continûment. Sans lui et malgré les autres astres fixés à la voute, en verre triplex ou de volcan qui retient ses rayons et sa chaleur, lumineux mais obscurs quand ils sont au sol, il ferait nuit, nuit complète et il n’y aurait pas de saisons. Pas davantage que dans ce jardin qui contient les spécimens les plus rares, les plus banals et les plus exemplaires, pas un atome végétal et pas une herbe ne manque, immobiles et secs dans un jardin sans air et sans hiver
l’arc-en-ciel, couleur rouge et vert clair est aussi un nuage et le reflet du soleil sur un nuage : le signe de la tempête. L’eau qui envahit ce nuage fait lever le vent et tomber la pluie et même dans certaines cavernes elle ruisselle doucement, quand dans la mer débordée c’est la plus pure et la plus souillée, à peine potable pour les poissons, mortelle pour les hommes. La terre repose sur l’eau comme un morceau de bois ou de quelque chose de semblable ou de quelque chose capable de flotter sur l’eau, la terre repose sur l’eau et flotte comme un navire, la terre flotte sur l’eau comme un bout de bois ou tout autre chose capable de surnager
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Ce texte est le fruit d’une commande de la Maison des écrivains et de la littérature dans le cadre du Parlement sensible réuni pour la COP 21. Les discours des 31 écrivains ont été publiés sous le titre : Du souffle dans les mots, 31 écrivains s’engagent pour le climat (Arthaud).
Les livres de Suzanne Doppelt sont publiés aux éditions P.O.L. L’un d’eux est paru en Norvège, Enga er giftig, traduction Thomas Lundbo, Margs marginale, 2010.
La rédaction de NWCC dit merci beacoup!